Une société de ville capitale :
les eunuques dans la Constantinople
byzantine (lVe-XIIe siècle)
Georges SlDÉRIS
Un troisième sexe
Les eunuques sont un sexe dans l'Empire byzantin, aux côtés des sexes masculin et féminin, de ce fait ils constituent une catégorie juridique spécifique, avec des limitations en droit1. Est eunuque tout homme qui est dans l'incapacité de procréer. Les juristes byzantins définissent deux ou trois catégories d'eunuques. D'une part les eunuques naturels, ou spadones, c'est-à-dire qui sont tels du fait de leur anatomie ou de leur physiologie ou le sont devenus suite à une affection. Ils peuvent adopter et se marier. Toutefois leur mariage peut être rompu à la demande de l'épouse ou des parents de cette dernière si le mariage n'a pas été consommé du fait de l'impuissance naturelle du mari dans un délai de trois ans après la célébration de l'union . D'autre part les castrats dont les parties génitales ont été retranchées ou dont les testicules ont été froissés lorsqu'ils étaient en bas âge et qui ne peuvent engendrer de façon définitive, on appelle alors parfois ces derniers thlibiai. Les castrats ne peuvent pas se marier, et jusqu'au IXe siècle ne peuvent adopter3. L'empereur Léon VI le sage (886-912) modifie cette dernière situation en autorisant tous les eunuques à adopter .
1. J'ai développé la question de la constitution des eunuques comme sexe à part entière à Byzance dans ma thèse, voir G. SlDÉRIS, Eunuques et pouvoir, p. 21-150, et sur les eunuques comme génos spécifique à Byzance, doté d'une sexualité, aux côtés des hommes et des femmes voir G. SlDÉRIS, Sexe, p. 221-222. Dans la novelle 98, P. NOAILLES et A. DAIN éd., p. 320-327, l'empereur Léon VI emploie ce terme de génos au sens de « sexe ». Il désigne comme gène, les sexes masculin et féminin, puis il appelle génos la catégorie des eunuques. Sur les eunuques comme « genre » à Byzance voir K. RlNGROSE, Perfect Servant, p. 4.
2. Théophile, Institutions, I, 11, 9, E. C. FERRINI, J. et P. ZÉPOS éd., t. 3, p. 31 ; N. /. 22 (535), c.6, p. 150-151.
3. Théophile, Institutiones, I, 11, 9, E. C. Ferrini, J. et P. ZÉPOS éd., t. 3, p. 31 ; Institutes, I, 11, 9, p. 5.
4. Novelle 26, P. NOAILLES, A. DAIN éd., p. 100-105.